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Zoe Lee : Pour une mode qui dure

by Manon Renault
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À l’ombre des grandes avenues, Zoe Lee, designer de souliers, nous présente sa nouvelle collection pour l’hiver 2018. C’est dans une boutique imprégnée de simplicité, située dans le quartier très  parisien du Marais, que Zoe Lee reçoit des clientes du monde entier. Le tout avec une spontanéité et une douceur déconcertante pour une créatrice qui aime jouer avec des matières brutes.

 Zoe Lee : c’est des chaussures : 100% faites à la main, 100% unique; fruit d’une quête perpétuelle des nouvelles techniques artisanales. Si la boutique est étroite, l’esprit de Zoe Lee est loin de l’être. La présentation prend vite la forme d’une discussion autour des tendances, du calendrier des défilés, des mises en scènes futiles et du règne du « m’as-tu vu ».  Des histoires de la mode qui font l’Histoire : que retiendrons nous  de 2017 ?

« J’ai envie de faire des choses qui puissent être comprises par les autres.Les créateurs doivent être comme ça : penser aux gens » Zoe Lee


Zoe Lee : de la technique à l’état brut

En 2017 la modernité n’est plus naissante. Elle est même, quelques fois  plombante. Si certains font rimer artisanat avec passé, les collections de Zoe Lee montrent que le coeur de la modernité se situe dans l’évolution technique qui permet aux savoir-faire les plus anciens, de vivre – survivre à toutes les époques. Zoe Lee  nous explique les particularités de chaque modèles, ce qui les rend unique, ce qui fait qu’elle les aime. Les essais ratés, les heures de discussions avec les artisans, les voyages pour trouver les meilleurs produits. Une passion rare, une passion qui requiert de la patience. Détourner des matières  de leur destin classique : utilisation de marbre, de rafia, de  bois injecté dans du  plexiglas. Des performances délicates- sans doute un cauchemar parfois : assembler le talon en plexiglas à la chaussure sans que ce dernier n’implose : un véritable défi.

Pourquoi les chaussures :Si  Zoe a commencé avec les vêtements ;(notamment lors de ses études à Saint Martins Central) c’est dans les chaussures qu’elle a trouvé matière à s’épanouir. Un domaine qui nécessite beaucoup de techniques. Une designer pragmatique qui aime travailler et questionner les frontières en restant à l’intérieur des structures. Inventer dans les contraintes. Respecter un cahier des charges : « Un designer ne fait pas que recopier les structures, il y’a toujours de l’invention »

Modèle Addison

Zoe lee décline ses collections autour de 9 modèles actuellement : plutôt qu’autour des calendriers des tendances. 

 

Combien De Temps ? Marche, tu verras

Ce qui distingue Zoe Lee: la patience. Pas un argument de vente : une patience sincère. Un respect envers ce qu’elle pense, ce qu’elle souhaite entreprendre : sinon elle arrêterait.  Alors que les collections se succèdent aussi vite qu’un Snapchat, Zoe refuse de se plier aux volontés de la fast-fashion, de la consommation dont le seul but est la consommation. Ses chaussures : elles sont faites pour DURER. Parcourir les boutiques de souliers à travers le  monde,  prendre le temps pour développer sa marque à son propre rythme- loins des grands groupes. Un parcours tout à son honneur, à l’heure de  la sur-production et de la surconsommation. Les modèles qui ne sont pas portables, pas confortables : elle arrête de les produire. Pour cela elle doit comprendre ses clientes : comment elles vivent avec ses créations, comment les souliers vieillissent, s’usent, se transmettent, et se reportent. Autre volonté : ne pas proposer des chaussures datées  mais des modèles intemporels. Pour ne pas finir avec le sigle d’une époque collée sur le pied, Zoe Lee s’évertue à faire autre chose – autre chose que des baskets et du Street wear . Pas de Hit Shoes, fabriquée avec négligence. Du coup on se demande : Peut- on aller plus loin dans cette culture du show qui néglige les processus de fabrication, la qualité… Juste des colabs pour agglutiner les plus de marques ensemble.

La perte de la patience : une caractéristique de notre temps ? Un mal qui transperce aussi bien les grands groupes qui investissent, que les consommateurs. Une mode qui se fait dans un temps saccadé au rythme du  see it buy it. Une injonction de laquelle Zoe Lee se préserve. Cela se lit dans ses choix de collaboration. Elle travaille avec des gens avec qui elle partage l’esthétique, avec qui elle peut avoir le temps de développer des projets.  Elle nous parle de Samuel Drira, ou de Christine Hyun Mi Nielsen avec une tendresse toute particulière : comme quoi il y a de l’humain dans la mode.

Zoe Lee: À la fuite de la célébrité

Sans se montrer, Zoe Lee montre ses pièces:« Ce n’est pas mon image que je vends : ce sont mes chaussures ». En effet, elle aurait pu se ventait  de son travail avec  Manolo Blanik puis d’Alexander Mc Queen et Vivienne Westwood. Mais elle se distingue par une rare modestie .

La célébrité , la visibilité ne l’intéressent pas. « Parfois la mode peut être toxique ».  Créateur et Designer : deux mots différents pour elle. Le designer est dédié à ses créations. « Est-ce que ce que je crée est nécessaire ? »

Alexander McQueen 1999

La figure du créateur varie : entre amoureux de sa propre image et véritable prodige maudit. Stagiaire chez Mc Queen, Zoe Lee respecte l’homme comme son oeuvre et son personnage. « Il savait créer des histoires. Ses défilés : c’est du théâtre.  Des mises en scènes nécessaires, car elles  illustraient et magnifiaient la collection ».

On se questionne: les défilés sont-ils toujours nécessaires ? Trop de Fashion Week ? Si cela permet aux designers d’avoir un recul sur leurs collections, cela à un prix.

Zoe Lee pour Hyun Mi Nielsen

Zoe Lee pour Hyun Mi Nielsen

 » Je n’aime pas aller aux défilés »- Zoe Lee

La frénésie de la visibilité : un point de non retour

Est-on allé trop loin ? Calendrier draconique qui tue la création, défilés à la chaîne, même produit aux quatre coins du monde.« Il n’y a plus de magasins qui proposent des sélections originales : il manque une réelle prise de risques » .

On évoque un système de la mode « qui semble être le même depuis des siècles » avec des rédactrices assisent au mêmes sièges depuis  » 30 ans ». De quoi bousiller leurs blue jeans, mais c’est vrai qu’ici ce ne sont des blue jeans communs :« un jean ou des baskets ne devraient jamais couté plus de 800 euros » Zoe Lee

On évoque avec elle la globalisation de la mode, la multiplication des collections capsules ; le conformisme, l’exhibitionnisme. On tombe d’accord : parfois c’est un peu déprimant.

Pourtant l’espoir est là, il frétille et frappe à notre porte. En particulier Rue du Parc Royal.

PARIS BOUTIQUE

19 Rue du Parc Royal
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Paris

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