Combien de collections par an ?
Un chiffre qui ne cesse d ‘augmenter et dépasse la logique traditionnelle des saisons. Pré-collection, collection croisière, collection haute-couture, prêt-à-porter et partenariat pour des objets en édition limitée : autant de collections, autant de logiques à conjuguer et d’acheteurs à convaincre, surprendre. Ne pas perdre les adeptes dans le flot des nouveautés. Construire autour de pièces classiques, des repaires caractéristiques d’une maison, tout en évitant les reproches qui vous qualifieront de conservateurs- de designers qui n’osent pas prendre « de risques ». Alors une question se pose : les créateurs ont-ils encore le temps de prendre des risques, le temps de trouver des inspirations nouvelles, de créer comme il le désire dans la conjoncture actuelle ?
La mode a t -elle atteint une vitesse maximale, dépassé les limites des possibles humains ( que ce soit d’imaginer que de construire et produire)- crash et burnout en vue…?!
Le travail c ‘est la santé ; un vieux proverbe, ou plutôt une perfide tactique de grand mère pour inculquer à la jeunesse les vertus du travail. Détacher de ce contexte ,cette phrase comporte-t elle un sens ?
Le travail fait partie de la santé : il faut donc l ‘exercer pour se maintenir, mais dans quelle mesure ? 35h ou travail perpétuel ? De quel travail parle t-on ? L’artiste est pris au coeur de ces questions…Une pause s’impose!
Dans la mode; les exemples de créateurs épuisés, excédés ne manquent pas …Christophe Decarnin -qui avait fait revivre Balmain en 2006; quitte précipitamment la maison. ..la rumeur parle de dépression. Galliano excuse ses excès et abus pour cause de fatigue mentale …Somme nous en train de tuer les directeurs artistiques ?
Raf Simons fera sa référence lors de la Fashion Week automne hiver 2016. Peu après son annonce, il revient sur les raisons de son départ au cours d’une interview accordée à la journaliste Américaine Cathy Horyn pour le magazine System.
Il y évoque la vitesse à laquelle l’activité créative est désormais soumise, ses envies et ses impressions sur les conditions actuelles de fonctionnement du milieu de la couture.
« Vous êtes constamment en train de créer, sans avoir le temps ». Une phrase qui retient l’attention. Un nouveau système à fait jour. Selon le créateur, cela fonctionne « techniquement ». Sans condamner ouvertement ce rythme nouveau, il déplore tout de même la désacralisation de la haute-couture. « Maintenant la haute-couture est pour tout le monde (…) Vous ne faites plus d’effort (…)Maintenant si quelque chose vous intéresse, une seconde plus tard, vous pouvez l’avoir. Et une seconde plus tard, vous pouvez la laisser tomber. »
L’autre aspect pointé par Raf Simons , c’est le manque de temps pour se ressourcer, retrouver une vie personnelle. Le créateur, amoureux de la campagne et des week-end à Eurodisney, blague sans ironie » Mais comment faire cela dans le contexte professionnel ? Vous achetez une maison et vous commencer à faire de la poterie? « .
Blague à part, Raf Simons entretient tout de même le grand mythe de l’inspiration artistique, ce grand thème qui différencie ces créateurs, hors du commun des mortels, en déclarant: « Je n’ai pas de problèmes avec le processus créatif en continu. Parque que c’est la raison même de ma présence dans le milieu ». Finissons sur cette magie et reconnaissons-une fois de plus- la grandeur de Raf Simons, qui a su se retirer en beauté, avant la collection de trop…
Place à d’autres projets : photographies, sa marque éponyme, et pourquoi pas de la poterie !