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Fashion Week Automne Hiver 2018- Jour 5 Fin des romans gothiques?

by Manon Renault
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Été 1816-Lac Lément : Marie Shelley, Lord Byron et quelques happy few se racontent des histoires de fantômes, parlent de résurrection et écrivent. Environ deux siècles plus tard, les créateurs se rassemblent à Paris. Dans des appartements privés du 8 ième arrondissement (Dumitrascu) ou dans les sous-sols du Palais de Tokyo, les scénographies des défilés raniment les ficelles des romans d’épouvantes. Dans la fumée, et l’encens, jaillissent des créatures : des fantasmes d’une nature irradiée d’un fluo holographique. Comme un écho à ce qui va advenir à la fin du séjour Suisse de Shelley : l’histoire d’un homme qui décide de créer un homme idéal. L’histoire de Victor Frankenstein. L’histoire d’un homme qui emprisonne ses peurs dans un autre, et crée un monstre.

 Frankenstein est un homme, mais c’est aussi Marie Shelley. Si pour durer les adaptations cinématographiques nous font le récit de la Fiancée de Frankenstein, doit -on évacuer l’idée d’un Frankenstein féminin ?

La question oubliée : 2018 a t-il transformé Frankenstein en femmeS ?

#Metoo, #Balancetonporc : on se perd en confusion, un roman feuilleton gothique, ou un simple soap ?  Les mais se multiplient. Un patchwork, une composition médiatique qui ressuscite tout un discours de l’hystérie : la femme en 2018 est devenue Frankenstein.
Rassembler toute l’affaire Weinstein en un mot , c’est comme vouloir faire un alliage de matériaux incompatibles : le résultat donne un monstre. Balmain ou Loewe prémunissent de ce récit.

 

 En se libérant des institutions qui les enferment , en sortant dans la rue, les femmes se sont frotées à une liberté nouvelle. Alors pour conserver l’idée d’une » bonne parole masculine » de nouvelles formes de contrôles font jours. Le vocabulaire de l’horreur, de la peur, de la confusion …Les nouvelles camisoles de forces ?

Dans la mode les créateurs s’affranchissent en se jouant des symboles de l’exclusion et la  monstruosité. Dans la mode , c’est plutôt le Frankenstein de Mel Brooks .


Issey Miyake: Trouver la science-fiction dans les traditions

Issey Miyake évacue la question de la monstruosité en alliant savoir-faire et créativité. Chez Balmain, Maison Martin Magiela ou Jarel Zhang : le plastique holographique fait fureur.À presque 80 ans, Issey Miyake occupe une fois de plus une place à part. Le graphisme des vêtements prend le pas sur la lubie de la lumière holographique. Des silhouettes sculptées dans des plis méthodiques, caractéristiques d’ Issey Miyake suffisent à la cause de la modernité. Les fantasmes de la science-fiction ne sont pas un jeu: travailler au coeur même de la tradition dans le plus grand respect- voila l’audace d’Issey Miyake.

 

 

Undercover: Clore le chapitre d’une mode dite de la « terreur »

Multiples, inclassables, insaisissables : chez Undercover tout un jeu sur le droit d’être multiple est présenté. Imprimé sur les vêtements : I’m happy and Sad. Both in the same time. Le droit d’être sportwear et preppy. D’avoir un look aux couleurs acidulées et sombres, le droit d’adopter le bombers avec un écharpe boy-scout.  En ramenant à la vie différents codes de la mode, Undercover se fait le roman gothique de ce qu’est profondément la mode. Soit un lieu qui recycle les tendances. Le résultat est loin de susciter la peur, même si une pointe d’ironie sur « la bête humaine » peut être lue dans les pantalons qui donnent des guiboles de grizzli.

 

Nina Ricci : Le procès d’un homme incompris ?

Guillaume Henry ne semble pas avoir bonne presse, un peu comme Frankenstein. Le voila exclu de la société modeuse. Mode trop élitiste, références peu fines : les rumeurs font jusqu’à annoncer son départ de chez Nina Ricci-le jour même du défilé. Pourtant dans cette collection, les plumes, les fourrures, la douceur des manteaux pastels viennent dire toute la poésie du créateur. Les mannequins portent des voilettes : un accessoire d’enterrement issu d’une autre époque- le fantasme de la veuve noire feutrée dans le chic absolu de son appartement hausmanien. Peut-être que Nina Ricci est devenue le reflet de la monstruosité de l’élitisme bourgeois. Ici Nina Ricci sera lu comme le deuil de l’hégémonie bourgeoise. Le deuil d’une position passive: ces femmes ont leurs rôles, leurs avis sur #Metoo. La tribune Nina Ricci , ou la Tribune des Catherines : nier leurs existences c’est finalement cela la monstruosité.


Si Frankenstein est un monstre : c’est un monstre d’amour et de poésie. Marie Shelley montre que c’est finalement Victor Frankenstein le monstre. Celui qui se joue de la nature, qui se joue des mécanismes : voila ce qui est effrayant. Dans la mode les femmes sont des frankenstein moderne: elles effraient et attirent. Du coup ça fait jaillir de le l’envie de la jalousie. Mais pas une fois ce sont elles les savants fous. Fini le temps de la satire des femmes savantes.

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