L’exposition Lisette Model au Jeu de Paume à Paris est la démonstration parfaite de la force de la photographie : être le témoin d’une époque ou d’un mode de vie, l’expression d’une mémoire collective. Lisette Model, photographe américaine d’origine Autrichienne, fait partie des grands noms de la photographie du 20ème siècle et a été une des pionnières de la photographie de rue.
Cette exposition de 120 clichés de la photographe regroupe des extraits de l’ensemble de ses grandes séries, de ses premières photographies prises à Paris et à Nice au début des années 30, à celles du Newport Jazz Festival ou de l’hippodrome de Belmont Park prises à New York dans les années 50. New-York a été une source constante par ailleurs, la ville, ses bars, ses rues, ses gens…
L’exposition oscille entre images célèbres comme ce cliché d’Ella Fiztgerald faisant écho à celui de Louis Armstrong et photographies plus confidentielles comme la série « Pedestrians ». Dans la même logique, elle passe de clichés de nantis de la société à ceux de personnages plus démunis. Cette prolifique collection de photos, venues de plusieurs galeries du monde entier pour la plupart, est riche d’émotions, de rires, de regards, de réalités également. Certains clichés sont clairement datés, d’autres sont plus incertains et sont plutôt rattachés à une période – peut-être à une époque – qu’à une année précise. On trouve également des exemplaires de journaux de l’époque avec lesquels Lisette a collaboré : Harper’s Bazaar, US Camera…
Lisette Model fixe un instant d’émotion sur pellicule. Elle exprime une certaine perception du monde à travers son objectif et nous prend à témoin de ces tranches de vie, de ces instants qu’elle décide de partager au delà des limites du temps. C’est brillant et démontre l’importance de tous ces clichés. Lisette ne vole pas ces instants qu’elle fixe à jamais sur pellicule, elle les capture comme un témoignage d’un instant, un bout de mémoire collective. Regarder ses photos, c’est un peu comme se projeter dans la scène qu’on voit. C’est particulièrement réussi avec sa série « Reflections » qui prend le pouls du New-York montrant des parties de la ville projetées sur différentes vitrines de boutiques, prémices d’une société de consommation ou sur ces photos de femmes bourgeoises toujours apprêtées, reflets d’une époque où les élégantes ne pouvaient se montrer que dans une tenue parfaitement soignée. Loin de poser un regard condescendant sur les sujets qu’elle photographie, Lisette pose un regard plein de respect et de passion. Le quotidien est saisi dans toute sa splendeur. Le sujet est le plus important comme dans « Running Legs » montrant l’agitation urbaine.
Lorsque la photographe était interrogée sur son travail de photographe, elle répondait ainsi : « En prenant une photo, je pose une question et à travers la photo une réponse est donnée, un instant qu’on ne peut fixer avec les yeux. On connaît les choses mais on ne comprend pas toujours tout ce qui nous entoure.«
Cette vision du travail du photographe m’interpelle tout particulièrement car elle rejoint la mienne. La photographie est là pour nous aider à comprendre le monde dans lequel nous vivons.
Et c’est ce qui pour moi en fait un art majeur, quoiqu’on puisse en dire….
Vous pouvez vous en rendre par compte par vous-même jusqu’au 6 juin 2010 à la Salle du Jeu de Paume.
Exposition Lisette Model
Commissaire : Cristina Zelich
Exposition organisée par le Jeu de Paume et la Fundación MAPFRE
Mardi (nocturne) : 12h à 21h
Mercredi à vendredi : 12h à 19h
Samedi et dimanche : 10h à 19h
Fermé le lundi.
Entrée : 7 € – Tarif réduit : 5 €
Jeu de Paume
1, place de la Concorde
75008 Paris
Métro Concorde (ligne 1, 8 et 12)
Crédit photos : © Lisette Model with the courtesy of Jeu de Paume
Marie-Odile Radom
