Le Comité Colbert et Bain & Company présentent les résultats de leur étude :
LUXE ET TECHNOLOGIE : LES DEBUTS D’UNE NOUVELLE ERE
L’industrie du luxe accélère son rythme d’adoption des nouvelles technologies, dont les bénéfices se manifestent en matière de fluidification de la relation client, d’excellence opérationnelle ou de réduction de l’empreinte carbone. Si les Maisons adossées à un groupe ont une longueur d’avance sur leurs consœurs indépendantes, toutes sont en train de tester des technologies supplémentaires ou projettent de le faire dans les trois ans à venir. Et, pour certaines technologies, le luxe est désormais pionnier. L’accélération de cette adoption passera par trois leviers essentiels : une révolution culturelle et organisationnelle au sein des Maisons, une mise en commun des forces et une ouverture aux avancées technologiques d’autres secteurs.
Ces enseignements sont issus de l’étude menée par Bain & Company pour le Comité Colbert. Cette étude s’appuie sur les données de 75 Maisons membres du Comité Colbert, des entretiens avec des dirigeants de Maisons, de consortiums et de partenaires technologiques et diverses recherches documentaires et expérience de Bain & Company.
Dans le secteur du luxe, une vague d’accélération s’amorce pour adopter des technologies nouvelles.
Le niveau d’adoption est encore faible mais les barrières commencent à tomber
- En moyenne, les Maisons membres du Comité Colbert interrogées pour cette étude ont adopté 2,3 technologies nouvelles parmi les seize sélectionnées (biotechnologies, recyclage moléculaire, impression 3D, intelligence artificielle et machine learning pour l’optimisation des processus, intelligence artificielle et machine learning pour l’engagement client, réalité augmentée et réalité virtuelle, inspection optique automatisée, scanner, imagerie 3D, holographie, analyse neuronale, gants et écrans haptiques, identification par fréquence radio, blockchain, métavers, NFT). Aucune de ces technologies n’a été adoptée par la majorité du secteur et seules la RFID, l’impression et l’imagerie 3D ont un taux d’adoption de plus de 30%.
- La perception d’une pertinence limitée de certaines technologies pour répondre à des besoins spécifiques est la raison mentionnée dans près de la moitié des cas de non-adoption. Vient ensuite le manque de compétences en interne.
- Les freins historiques, comme l’incompatibilité avec l’ADN du luxe ou la qualité insuffisante de l’expérience technologique sont rarement cités, attestant de la transformation culturelle du secteur et des progrès qualitatifs des technologies analysées.
L’adoption s’accélère mais des disparités de rythme et d’ampleur demeurent
- En moyenne, les Maisons testent aujourd’hui (ou projettent de déployer dans les trois ans à venir) 3,2 technologies supplémentaires. Ces tests concernent l’ensemble des technologies et notamment les plus émergentes : NFT, métavers, blockchain, holographie, gants et écrans haptiques, analyse neuronale, scanner.
Les Maisons adossées à un groupe ont adopté en moyenne 2 fois plus de technologies que les Maisons indépendantes. Ce sont les technologies les plus récentes qui concentrent les déséquilibres. En revanche, sur les technologies les plus mûres, les Maisons indépendantes ont rattrapé leur retard et affichent des taux d’adoption proches de ceux des Maisons adossées à un groupe.
Un intérêt croissant pour la technologie au service de 3 objectifs stratégiques majeurs: l’engagement client, l’excellence opérationnelle et le développement durable
L’engagement client est le premier objectif visé par l’adoption d’une technologie
- L’engagement client constitue, de loin, le premier centre d’intérêt du luxe en matière de nouvelles technologies. L’essor du marché chinois puis la crise du Covid ont accéléré le déploiement de technologies personnalisant et enrichissant les expériences de vente à distance, d’inter-canalité et d’immersion dans l’univers des marques (notamment imagerie 3D, réalités augmentée et virtuelle, intelligence artificielle).
- De suiveur, le secteur du luxe devient « meneur ». Malgré une prise de position tardive et grâce à ses efforts de rattrapage, l’adoption technologique du luxe au service de l’engagement client est à l’aube d’une troisième phase : celle qui érige le luxe en pionnier. Par exemple, Yves Saint Laurent Beauté, très en avance dans le domaine des neurosciences, a développé une technologie d’analyse des réactions neuronales en présence de différentes odeurs qui permet l’hyper-personnalisation des recommandations à partir de l’inconscient comme ultime expression de l’intime.
- Les NFT et le métavers sont les technologies qui suscitent le plus d’intérêt pour le futur ; les NFT venant proposer un nouveau modèle de CRM et le métavers un nouvel univers immersif. Adoptés par seulement 5% de pionniers à ce jour, les NFT pourraient se déployer massivement dans les années à venir : 51% de l’industrie du luxe est déjà en phase de test ou planifie des lancements avant 2025. C’est le plus fort niveau de projection, toutes technologies confondues (jusqu’à 72% pour les Maisons adossées à un groupe).
Un intérêt croissant se dessine pour les technologies au service de l’excellence opérationnelle
- Au sein de ce groupe, la technologie d’identification par radio fréquence (RFID) fait figure de favorite. La blockchain, qui permet une traçabilité de bout en bout des produits, concentre les expérimentations (39% des Maisons en phase de test). Suit l’intelligence artificielle (29% en phase de test), visant à optimiser l’allocation des stocks, la fluidité de la chaîne d’approvisionnement et les structures de collection.
Le développement durable comme 3ème objectif
- Les nouvelles technologies ne sont pas encore pleinement perçues comme catalyseurs de réduction de l’empreinte carbone, les maisons se concentrant également sur d’autres leviers d’action.
- Toutefois, les expérimentations se multiplient à diverses étapes de la chaîne de valeur (ex : utilisation des biotechnologies pour créer de nouveaux matériaux et procédés de fabrication écoresponsables en alternative aux matières animales…).
- La généralisation des technologies pour l’excellence opérationnelle contribue également à accélérer l’écoresponsabilité du luxe. Les technologies d’anticipation qui permettent de prévoir la demande et de mieux gérer les stocks (intelligence artificielle intégrée dans les prévisions de vente pour produire au plus juste, jumeaux virtuels des opérations, etc.) induisent de fait un effet sur l’empreinte environnementale en évitant surproduction, surstock, surconsommation, déchets, pertes…
« L’adoption des nouvelles technologies dans le luxe n’en est qu’à ses débuts. Celles-ci peuvent jouer un rôle central dans la transformation en profondeur du secteur : au service des clients, de l’excellence opérationnelle et du développement durable. Les champs d’application à explorer sont encore nombreux et prometteurs. La mise en commun des forces à l’échelle du secteur sera un puissant accélérateur » déclare Mathilde Haemmerlé, Associée en charge du pôle Luxe chez Bain & Company Paris.
« La créativité et l’intérêt pour la nouveauté sont des caractéristiques essentielles du modèle économique du luxe depuis toujours. Sa capacité à intégrer des technologies nouvelles en phase avec ses propres exigences témoigne de la grande vitalité et de l’agilité de notre secteur. Cette accélération contribuera à faire du luxe un pionnier dans l’innovation technologique, comme il l’est déjà dans l’innovation non technologique. C’est cette dynamique que le Comité Colbert, comme centre d’expertise, a voulu mieux comprendre, au bénéfice de ses membres, dans le cadre de cette étude menée avec Bain & Company » conclut Bénédicte Épinay, Déléguée générale du Comité Colbert.
Vous trouverez l’étude à ce lien.