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INSIDE CHANEL : VENISE

by pascal iakovou
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LES DESTINATIONS : L’histoire
Tels des astres qui, une fois reliés, formeraient une constellation, certaines villes ont particulièrement marqué Gabrielle Chanel. Deauville, Biarritz et Venise comptent parmi les étoiles de cette carte du ciel CHANEL. Ces destinations furent le fruit de rencontres, de voyages placés sous le signe de l’amour ou de l’amitié avec quelques-unes des personnes les plus importantes de la vie de Gabrielle Chanel. Chaque ville, à sa manière, a inspiré la créatrice, a façonné l’allure CHANEL : la découverte d’un univers sur les champs de courses, celle de courants architecturaux et artistiques au détour de ruelles ensoleillées, le pressentiment de styles de vie à venir sur le pont d’un bateau ou sur une plage, l’instinct de futures envies en promenant simplement son regard sur les femmes également en villégiature…
Partout, Gabrielle Chanel observe le monde qui l’entoure, s’en nourrit et puise en lui comme une force vive créative.
À Deauville, au tournant du siècle, elle sent déjà le rôle primordial qui l’attend. L’histoire lui donnera raison : c’est ici qu’elle connaît ses premiers succès. Et c’est ici que le siècle naissant assistera au premier triomphe d’une femme entrepreneur. Biarritz, où elle ouvre rapidement une nouvelle boutique, confirme que sa vision de la mode, des femmes et du monde des affaires est la bonne. Venise enfin permettra à Gabrielle de se découvrir un appétit farouche pour les arts et l’architecture. La cité des doges lui procure un véritable choc, celui de la beauté, et pose les bases de son éducation culturelle. En Normandie, sur la côte basque ou en Vénétie, Gabrielle Chanel a tracé sa route vers le succès grâce à l’une de ses plus grandes forces : faire confiance à son incomparable instinct, celui qui lui fait deviner avant tout le monde où être toujours au bon endroit au bon moment.

VENISE
En 1920, Gabrielle Chanel peine à se remettre de la disparition de Boy Capel, survenue l’année précédente. Pour la distraire de son chagrin, ses plus proches amis Misia et José- Maria Sert décident de l’emmener à Venise. La découverte de la Sérénissime, écrin artistique si cosmopolite, est une véritable renaissance pour la créatrice. Et devient l’une de ses sources d’inspiration majeures.
José-Maria Sert livre à Gabrielle Chanel les clés et les mystères de la cité, l’initie à ses chefs d’œuvres et ses trésors de l’histoire de l’art. Les styles baroque et byzantin, l’architecture des palais et des églises, les couleurs utilisées par les peintres, la grâce des verres de Murano sont autant de splendeurs qui marquent profondément la créatrice. Au peintre Tintoret, elle emprunte les pigments pour son premier rouge à lèvres et, plus tard, pour la fameuse doublure de ses sacs. De la basilique Saint-Marc, elle conserve les images des mosaïques, les cabochons enchâssés des croix et médailles byzantines qu’elle réinterprète au travers des bijoux qu’elle crée et surtout qu’elle porte en toute occasion. L’or des tapisseries et des icônes religieuses est martelé sur ses accessoires, traduit en cuir sur ses souliers. Les miroirs, le cristal, le lion de Saint-Marc, les bois polychromes, ajourés ou dorés se transforment en décor qu’elle installe dans son appartement rue Cambon, prolongeant ainsi le souvenir de ses voyages et, surtout, de cette ville devenue l’un de ses endroits de prédilection. Pour ses collections comme pour ses appartements ou simplement pour elle-même, elle fait appel notamment à l’orfèvre Goossens pour qu’il lui conçoive des lignes de bijoux aux accents baroques et byzantins, qu’il lui façonne des boules de cristal qu’elle fait disposer sur des supports de métal doré, dans l’esprit de cette exubérance toute vénitienne, à la fois précieuse et profonde, riche de sens et d’histoire.
La lumière et le calme de la Sérénissime apaisent enfin Gabrielle. Les mondanités lui rendent le sourire et sa joie de vivre : Misia l’entraîne dans le monde aristocratique et artistique de Venise. Ensemble, dans la journée, elles se retrouvent sur la plage du Lido. Amoureuse du soleil, Gabrielle y bronze en pyjama de plage et invente une sandale à semelle de liège et simples lanières qu’elle a commandée à un bottier vénitien. Son élégance désinvolte séduit immédiatement la haute société vénitienne et la jet-set en villégiature.
Le soir, elles assistent à des spectacles et des fêtes somptueuses, croisent l’écrivain Paul Morand. L’écrivain les relatera d’ailleurs dans son ouvrage L’Allure de Chanel. Gabrielle rencontre également le danseur Diaghilev: entre eux, le coup de foudre amical est instantané. En secret, elle l’aidera bientôt à financer son ballet le Sacre du Printemps. C’est encore elle qui, lorsqu’il décédera en 1929, rentrera précipitamment d’une croisière sur le yacht du duc de Windsor et s’arrangera pour que ses funérailles aient lieu sur l’île San Michele que le danseur aimait tant, accompagnant même sa dépouille en gondole jusqu’à sa dernière demeure. Venise demeurera l’un de ses ports d’attache, celui où elle reviendra pour de courts séjours mais toujours avec la même ferveur et la même passion pour cette ville qui l’inspira tant dans sa mode et sa vie.

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