Hashtag du jour #Offwhite
Toute la PFW avec #lamodedeManon
Dans la liste des maisons de la fashion week parisienne, nombreuses sont celles dont le nom des créateurs ne correspondent plus au nom de la marque, ça frôle la schizophrénie. Si pour certains c’est évident ( Monsieur Dior, ou Monsieur Saint Laurent ne sont plus), pour d’autres le mystère demeure ( le cas John Galliano). À côté de cela, de jeunes marques se font leur place : elles s’affranchissent du poids des noms en fondant des identités qui passent par l’esthétique des vêtements, mais également la manière dont ils sont communiqués au public, ils répondent à une sorte de philosophie. (Off White, Muzkin)
En 1998, Jean-Jacques Goldman écrit « On ne change pas » pour Céline Dion. Une chanson dans laquelle la canadienne affirme que peu importe les situations, « ce ne sont que des costumes » qu’elle revêtit. Des déguisements : la mode serait-elle une vaste imposture ? Un brin réducteur?…
En 2018, les manifestations pour que chacun puisse affirmer son identité se multiplient. Habiter son corps : un droit qui passe également par le vêtement. À l’heure de cette bataille, réduire la mode à une vaste « supercherie frivole » ou un doux mensonge qu’on se récite : cela semble passéiste. Doit-on rester habillé dans les cotillons que la vie nous a choisi ? Assigner à une classe, à une race, à un genre ? Quelque part c’est rassurant : c’est structurant, les gens peuvent se reconnaître et se catégoriser pour mieux se dominer. L’arnaque c’est finalement de croire encore dans le discours marketing québécois « de la petite fille ».
La question oubliée : rester habillé dans les vêtements que la vie nous a donné -qui doit en décider?
Les créateurs eux-même se défont et se reconstruisent. Certains diront que Isabel Marrant a refait du Isabel Marrant, que Ann Demeulmeester et Rick Owens sont abonnés au noir et à la mode « importable ». Les marques les plus récentes n’échappent pas à la sanction. Pourtant le défilé Off-White de Virgil Abloh nous a prouvé que l’on pouvait passer d’un look casual, à urbain sans être diagnostiqué schizophrène. Le secret: le respect des codes vestimentaires et des mesures, une connaissance de l’histoire des vêtements, qui nous épargne du mot « déguisement ». Chez Y/Project, Glenn Marteens passe des total looks jean, aux robes de soirées sans fausses notes. Guidé par une superposition de vêtements qui est la même quel que soit le style. Enfin Muzkin propose un premier show parisien : la créatrice Kate Han rend hommage à la culture « Wuxia » ou les identités sont multiples-sans être schizophréne.
Chloé : en mal de jeux de rôles sociaux
Pour sa deuxième collection, Natasha Ramsay Levi est présente dans les coupes des jupes, les bottes en cuir ou les chemisiers amples en soie. Son twist est devenu sa signature et traverse sa carrière : que ce soit les années Balenciaga, ou Louis Vuitton. La créatrice à ce privilège unique : s’adapter aux codes des maisons sans perdre son style. Un exercice dont cette collection, qui revisite le Chloé des années 70 ( le Chloé de Karl Lagerfeld) se fait l’écho. Un hommage au cinéma des années 70 et aux muses « de Chabrol et Bunuel » : des références populaires ? Levi déclare à Fashion Network » les bourgeois: une classe qui ne cesse de déplacer ses propres limites ; parfois ils deviennent des révolutionnaires, tandis qu’à d’autres moments ils sont très conservateurs. Et j’avais envie de jouer avec ça. » La métamorphose sans psychose: un privilège bourgeois chez Chloé.
Manish Arora : une identité qui carbure à l’amour
« Orange is the new Zen »- le nom de la collection hiver 2019 de Manish Arora. La signature du créateur réside sans doute dans sa sincérité à aimer, et essayer de comprendre les uses et coutumes de chacun. Une ode aux milléniales (proies marketing du moment) avec les références aux emoji, mais également aux moines bouddhistes. Une visite indienne de l’Asie, pleine de couleur, d’orgenza et de sequins qui sentent le doux parfum du créateur. Si « Orange is the New Zen » alors « Orange is the new Black, is the New Zen ». Sans tomber dans les syllogismes : la révolution chez Arora est de dire je suis citoyen du monde. Être ramené à une éthnicité ne relève plus que de l’administratif. D’ailleurs parler de la vision d’un créateur indien sur l’Asie : une réduction de journaliste ?
From Paco To Julien : le fil de fer du temps ?
Au milieu des sixties, Françoise Hardy chante vêtue des créations de Paco Rabanne. Aujourd’hui, si aucune chanteuse « populaire » ne porte du Paco Rabanne, peut-être porteront-elles du Julien Dossena ? Pendant un instant, les spectateurs du défilé ont cru revivre cette époque métallique et libertaire de 68. Le métal a fondu : définitivement plus léger. Julien Dossena revisite les classiques de l’armoire d’ Hardy, dans des matières actuelles et sur des adolescentes « fille de ». Le métal de Paco Rabanne est-il plus souple en 2018 ?
Le privilège de changer : réduit à un fragment de la population?
Même les stars, ces êtres oh combien admirés sont soumis à la règle. Kim Kardashian n’a pas le droit de passer du look chetah aux cheveux roses , alors que certains se permettent toutes les métamorphoses-sans aucunes critiques. Pour les autres il y’a l’hôpital psychiatrique. La schizophrénie : un nom comme une solution facile pour ordonner ce que l’on ne maîtrise pas. Un thème de chanson pour « S’il suffisait d’aimer » …