Très Intime – Solange
Payot – 15€
www.payot-rivages.net
Solange, de son nom Ina Mihalache, connue pour ses vidéos récréatives et percutantes sur le web « Solange te parle », a publié en février dernier son recueil de témoignages Très Intime. Ce livre expose l’intimité sexuelle de vingt femmes, arbore une crudité du langage et un franc-parler assumés, et force des zones de silence – qui se veulent au final « libératoires ». Cette compilation réalisée à partir d’entretiens radio, menés en 2015, n’était pas destinée à devenir un livre – au demeurant. Aujourd’hui, le livre accouche d’une polémique autour de plusieurs de ces femmes qui affirment ne pas avoir été informées de la parution du livre. Si quantité d’articles interrogent les dimensions morale et éthique liées à la parution de ce livre, je prends ici le parti d’interroger le livre, ses desseins, l’auteur, plus que la controverse autour.
En parfaite fille du virtuel, et elle aime à se qualifier ainsi, Solange interroge « des femmes avec lesquelles elle n’a pas eu à lutter pour les faire parler ». Castées à droite à gauche sur les réseaux et les blogs, parfois recommandées par des tiers, elles ont toutes été généreuses et expansives, et « se sont relevées les manches » – pendant ces trois heures d’entretien – pour replonger dans leurs histoires de cul et raconter énergiquement à Solange les grandes joies, les remous et les éclaboussures aussi de leurs parties de jambes en l’air.
L’auteure est comme captivée, émerveillée, par l’honnêteté des questions liées au corps et à l’intime. Sans anticipation, par une approche directe, empirique, Solange va devoir se frotter à ce tiers de femmes abusées, parfois violées. Dès lors, elle se sent investie, chargée, d’une mission humaine qui redonne confiance et ravive du pouvoir – à travers la parole.
Solange y questionne sans relâche, traque le détail, fait jaillir des discours complémentaires, et n’a qu’une envie « comprendre le concret » – sans aucunes découpes dans la réalité. Pour elle, la confession se veut « hors du temps et de l’espace », naturellement libératoire. Sous couvert d’une pudeur juste, ténue, tous les mots sont adultes, et ils sont tous là. Véritable « poésie de la crudité », certains lecteurs se disent gênés, quand d’autres se gavent de cette verbalité grisante et affranchie. Car « elles s’y sont allées », c’était le contrat, c’était leur défi.
(Vous retrouverez les réponses de l’auteur à mes questions dans la bande audio ci-dessous).
Elisa Palmer. Comment avez-vous sélectionné ces 20 femmes ? Quels étaient vos critères de sélection ?
EP. Cette aisance à poser des questions cul, innée ou acquise ?
EP. Quels étaient vos objectifs derrière ce livre ? Secouer les consciences ? Interroger les mythes sexuels et les idées reçues sur la sexualité ? Faire une cartographie des différentes relations possibles entre une femme et sa sexualité ? Rappeler les abus et les traumatismes silencieux ? …
EP. Pourquoi cette tranche d’âge 18 – 46 ans ? Avez-vous prévu de faire un livre qui interroge des femmes plus âgées, voire des femmes plus jeunes ?
EP. Est-ce que la sexualité des femmes ménopausées pourrait vous intéresser, faire l’objet éventuellement d’un deuxième livre ?
EP. Quels sont vos prochains projets artistiques et littéraires ? Souhaitez-vous nous en parler même brièvement ?
EP. Quels sont les sentiments qui vous ont animé régulièrement pendant et après ces témoignages ? Pudeur ? Bienveillance ? Interrogation ? Compassion ? Gratitude ? …
EP. Aviez-vous avant chaque entretien une liste de questions précises ? Ou les questions naissent-elles davantage de façon plus spontanée lors de vos discussions avec ces femmes ?
Merci encore à Solange.
Elisa Palmer