Ilja: l’inconstance de la matière. Un défilé beau ( tout simplement) et intelligent ( aussi!)…

Présenté dans la cour de l’ambassade du Royaume des Pays-Bas, la collection Ilja se déroule dans un cadre ensoleillé, qui fait ressortir l’odeur de l’herbe fraîchement coupée; on se croirait presque à Ille-sur-Têt, en pleine Nouvelle de Prosper Mérimé.

Altesse du podium, une statue blanche trône, est c’est d’elle que surgissent les mannequins. L’architecture des vêtements évoquent directement la rigidité de la matière dans laquelle a été sculpté cette fameuse statue. Hommage aux performances qu’ont livré les plus grands sculpteurs au travers des siècles, cette collection donne l’occasion de réfléchir sur les prouesses de cet art. Parvenir à transformer la pesanteur des matières en  des voiles légers qui enveloppent les corps de muses et déesses. Égaler les plis laissées par les ondulations du vent sur les vêtements, et  rendre les mouvements du corps.- Faire oublier le poids des matériaux- donner l’illusion.

Entre Nouvelle fantastique, ( le Vénus D’ille) et tableau surréaliste ( la matière qui fond chez Dali), et en pleine canicule, les robes se succèdent et fondent peu à peu. Des robes courtes , aux volumes géométriques, s’échappent  peu à peu des voiles. Les vestes et les manteaux s’ouvrent progressivement sur des robes à grand décolté en V. La palette des bleus et noirs laisse part à des percés oranges lumineuses : comme des lustres vivants…

Préférant l’extérieur, la maison Ilja n’enferme pas son spectateur dans un milieu rigide où tout est pétrifié. Dans ces jardins, les objets inanimés retrouvent une âme. De la haute couture : de la vrai. Des matières de qualités, des découpes maîtrisés : Ilja est une couture cinématographique . Un cinéma d’auteur, sans cesse en bouillonnement, et qui se questionne. Ici le thème pourrait être la constance de l’objet à travers l’inconstance de la matière…
Au déla de ces prétentions intellectuelles , c’est tout simplement beau.

Dans un monde ou tout a pris substance de pierre,  Ilja propose un défilé qui au delà de vêtements haute couture aux découpes impeccables, remplissant avec exception,  tout les effets auquels ils sont destinés . La maison invite à une histoire dont elle déroule le fil de A à Z; et sans aucun faux-pas. La haute-couture touche au plus haut, au plus prestigieux. Elle est, ce qui fait sans doute le plus rêver, ce qui paraît le plus éloigné de la réalité. Les défilés ne peuvent se contenter de stériles représentations, ils doivent nous perdent dans les palais, dans les labyrinthes des rêves.