Entre les deux tours de l’élection présidentielle, la Galerie Rx s’est jouée de l’actualité politique. Par le truchement des œuvres de Pierre Laniau, elle s’est offert un focus sur la portée des affiches électorales, les messages subliminaux pouvant être véhiculés par elles.
Pierre Laniau s’attache à les transfigurer, à se les approprier. Elaborant un échantillonnage d’affiches allant de 1988 à 2012, il intervient sur chacune d’elles. Hommes de droite, hommes de gauche tous se retrouvent scrutés et leur message de campagne, réinterprété. Oscillant entre aplat de couleur, taches et coulures de peinture, l’artiste se joue du jeu politique et s’approprie le ‘matériau’.
Les techniques révèlent, par le prisme graphique et chromatique, la non image, celle cachée au public. À contrario, elles peuvent cerner certains aspects, travers connus, des candidats. Entre portraits historiques, portraits de Princes et dénonciation de la propagande, les tableaux s’imposent.
Une affiche de 1995, présente L. Jospin. La peinture, en aplat sur la droite de l’image parait obscurcir l’avenir du candidat ’postulant’. Une deuxième le voit entièrement recouvert de pigment bleu, blanc, rouge. L’homme disparait, dans le même temps son avenir politique s’étiole.
Mitterrand, Chirac, Balladur n’échappent pas à l’exercice
La dernière série, celle de 2012, montre un Nicolas Sarkozy en inadéquation avec son slogan, La France Forte. Un halo de couleurs englobe parfois son visage, créant une incertitude, une inquiétude presque. François Hollande se trouve affublé de pseudo excroissances colorées.
Une autre fois, leurs deux visages sont comme lacérés par des enchevêtrements de peinture. Ces simili-griffures rappelleraient presque à notre esprit combien tous deux représentent peu de chose face à la renommée d’autres hommes politiques et à l‘Histoire.
En quelques questions il est possible de mieux saisir la démarche de P. Laniau et d’entrapercevoir son processus créatif.
De quand date votre intérêt pour ce sujet, et ce support, ?
De 1988. Cette série est pour moi un moyen de travailler sur l’image du temps. Une affiche est une image sophistiquée, un instrument de communication mais également un instantané du moment. J’élabore là un travail de construction et déstructuration non seulement esthétique mais temporel.
Pensez-vous que les affiches influencent réellement le vote, ?
Indéniablement. Le slogan, l’image, sont capitales. Elles peuvent influencer. D’autre part, elles reflètent la manière idéale dont l’individu veut être perçu. Prenons l’exemple de Ségolène Royal, elle peut parfois être mise en avant comme une star de cinéma.
Vous ne faites pas figurer d’image représentant les Lepen, père et fille. Vous souhaitez par cet acte les ‘rayer’ en quelque sorte de la scène politique, ?
D’une certaine manière. Dans l’absolu il est délicat de travailler avec leur image. Toute ‘intervention’ les concernant est sujette à caution. Je ne voudrais pas voir mon travail mal interprété. De plus, ils véhiculent une certaine violence, par leur discours etc, .. J’aurais craint de rajouter à cette violence, de l’accroitre de la conforter.