Home Art de vivreCulture Shame : Nous ne sommes pas mauvais, nous venons d’un endroit mauvais.

Shame : Nous ne sommes pas mauvais, nous venons d’un endroit mauvais.

by Elisa Palmer
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Paris, le 8 décembre 2011,

Film britannique de Steve McQueen avec Michael Fassbender, Carey Mulligan, James Badge Dale. (1 h 39.)

I / Son corps, à lui, bouffe littéralement l’écran.

Accrocher son regard à autre chose relève par ailleurs véritablement du défi.

Et c’est sans se soucier le moins du monde de nos yeux qui capturent chaque angle et chaque centimètre de sa plastique – à la limite du superbe – que Brandon se balade à poil dans son appartement situé non loin de Wall Street.

Les mouvements de son corps, dans une sorte d’histoire sans paroles, défont et refont le film.

On entendrait presque jusqu’aux battements de son cœur (pour les fans de Dirty Dancing, le fameux « c’est un feeling, un battement de coeur, cocon cocon »).

Sur fond new-yorkais, se tissent l’interminable course aux « attrape-regards », les yeux qui matent urbi et orbi à 360° tout-ce-qui-passe, les pulsations cardiaques d’un exercice de drague très poussive dans le métro, les vidéos porno à la pelle, les sites de cul où l’on impose et dicte ses envies à la fille derrière l’écran, les êtres magiques et maléfiques de la nuit et les parties de « baise » à ne plus savoir (quoi) faire.

Et paf dedans : l’addiction sexuelle.

II / Puis – et sans demander la permission à son frère – Sissi débarque, et le mot est dit.

Sissi, la petite sœur, blondinette aux racines sombres, american vintagée du chapeau aux pieds, peu couverte-trop offerte, avec la panoplie du « aimez-moi » : sourire malicieux et œil pétillant.

On ne sait pas d’où elle sort, ni d’ailleurs pour quelles raisons elle en sort, mais elle est là, posée en merveille blonde sur le qui-vive qui pousse un peu la chansonnette sur un « New York New York » (Frank Sinatra) à un rythme lent.

Débraillée, dépressive et suicidaire, cette jeune femme partage avec son frère le secret de ces existences en crise et de ces appels d’air, qui empestent les misères et violences d’un autrefois aux abois.

Ce film crache beaucoup de buée sur les vitres…

Et dans la captation des personnages qu’on vient – nous aussi – un peu pénétrer par tant de baisers interrompus et trêves de chasteté, il y a quelques chose qu’on surprend, émouvant, dans ce rapport intime et fraternel, qui vient se dresser victorieux dans ce magma proprement abjecte et scandaleux.

A voir.

Elisa Palmer

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