Un coup à prendre
Xavier de Moulins
Au diable vauvert
décembre 2010
17€
Paris, le 2 février 2011
The House That Jack Kerouac Built / The Go-Betweens
Vivre à Paris demande à tout un chacun – ici-bas – de faire plusieurs activités à la fois (et non pas une activité à plusieurs). Appelons cela – pour faire simple – « l’ubi-activité ». C’est un peu comme, cette déferlante mode qui ne semble pas vouloir tarir cette saison, le bi-matière. On aime, que dis-je, on raffole de mixité, de polyvalence et de formes divisées en tout et pour tout. Car allez – osons le dire – avoir l’impression de pouvoir mener plusieurs choses en même temps revient surtout à avoir ce fier sentiment d’aller plus vite. Or, et à bien y réfléchir, accomplir plusieurs tâches en même temps n’est que la résultante de ce choix, celui de justement ne pas en faire… Qui, pour tout caser en une journée, contraint et force à se diviser pour mieux se multiplier. On comprend mieux, du coup, pourquoi les gens emploient le verbe « jongler »…
C’est comme ça que… Dans les transports en commun, à l’aide de son iPod Touch ou de son iPhone, et à grands coups de méthodes Assimil, on se perfectionne en anglais, entre Duck Sauce et Taio Cruz… Qu’on s’applique du vernis sur les ongles de pied, en mettant au micro-ondes un plat cuisiné… Parce que si le vernis sèche – presque – complètement en une minute, et que si on met – presque – une minute pour se peinturer les 10 ongles, ben en 2-3 minutes, on est pas mal niveau timing… Qu’on peut remplir un formulaire de la CAF, tout en continuant à rompre en direct sur le Chat de Facebook avec son mec, tout en continuant à remplir son panier sur vente-privee…
Bref, en jeune femme de mon âge, active & occupée, j’avais décidé moi-aussi de donner dans le « plusieurs activités à la fois ». Un truc dans le genre : « Une tête bien faite dans un corps bien fait! ».
Qui n’y a jamais pensé ?
C’est donc perchée sur mon vélo (d’intérieur), que j’avais décidé à la fois d’actionner le mode cardio et de mettre la puissance 8 au niveau de la pente, pédaler comme cela durant 30 minutes, puis 5 minutes de récupération, puis durant encore 30 minutes, suivies encore de 5 minutes de récupération. 70 minutes. Tout était calculé et programmé – à merveille – du coté du « corps bien fait » (deuxième partie de la phrase). Maintenant, pour la tête, j’avais opté pour l’ouvrage suivant : Un coup à prendre de Xavier de Moulins. Non pas pour le titre, mais plutôt pour le nombre parfait de pages.
180 pages, ça me donnait une vitesse de lecture de 2,5 pages par minute, si – bien sûr – je gardais le rythme même en grimpant les pentes les plus ardues…
J’avais lu la critique de Benjamin Berton, vite fait/bien fait, en préparant mon sac de sport, et je me souvenais de ça : « Résumer le livre ne prendra qu’un instant et ne gâchera en rien la lecture. Un Coup à prendre est sans surprise, ce qui en fait un divertissement sans frais ni déplaisir. Antoine partage avec nous sa vie de père. On le sait ce n’est pas facile tous les jours. 80% des gens connaissent ou connaîtront ce plaisir : De Moulins n’invente rien et chacun pourra se retrouver facilement dans ce qu’il dit. Antoine vit avec Claire qui, depuis ses maternités, n’est plus vraiment la même : moins sexy, plus grosse et plus « maman dans sa tête ». Du coup, il la quitte pour une jeune fille qui fait vraiment l’amour et qui permet au papa de se retrouver dix ans en arrière, quand il sautait des jeunes filles vachement bien foutues dans des chambres d’étudiantes (quelle époque !). Antoine quitte le domicile conjugal et redécouvre, à l’occasion des gardes alternées… qu’il a deux filles remarquables. C’est tout. Comme on est magnanime, on ne lâchera pas la fin. ».
Ben figurez-vous que non seulement j’ai pris un de ces vrais plaisirs à faire du sport, et que – Cherry on the Cake – dans les pentes terriblement prononcées, j’allais même plus vite que la normale… Parce que le livre excite et met en branle, agite le sang et actionne l’énergie des organes. Quelques extraits qui m’ont passablement rendue très sportive.
Page 33
- C’est juste des histoires de grands qui ne concernent pas les enfants.
Oui, j’ai dit cette phrase extraordinaire : ce n’est pas votre problème les poulettes, suivez le guide!
Alice a cru bon de préciser ma pensée.
- Papa et maman vous aiment toujours. Ce n’est pas de votre faute si votre père est un porc et se barre avec une sacrée pute.
Page 37
Ne pas oublier que, dans grossesse, il y a grosse.
Je n’avais pas signé pour finir avec un éléphant de mer militant à Greenpeace. J’avais aimé une bombe atomique, et mon Hiroshima me manquait. Je sentais qu’il y avait eu tromperie sur la marchandise. J’avais loué un bungalow pour deux avec vue sur une plage privée de sable blanc, je me suis retrouvé dans l’enfer d’un hôtel club donnant sur le parking des autocars et personne pour me rembourser.
J’étais à court d’imagination, même en fermant les yeux mon coeur bandait mou.
Page 50
- Et le problème, c’est qu’avec vous c’est toujours la même histoire. Quand on vous croise la première fois, vous avez l’air tellement largués qu’on a envie de vous aider et puis quelques mois plus tard rebelote, vous repartez vous installer chez une nouvelle conquête que vous prenez en trois jours pour la femme de votre vie et on se retrouve avec le même appartement sur les bras parce que…
- Parce que quoi…?
- Parce que, excusez-moi d’être aussi directe, mais vous êtes comme tous les hommes, incapables de vivre seul.
Page 180
Aujourd’hui c’est à son tour, c’est la même chose et c’est différent parce que quand Alice franchit la porte, je sais qu’il n’y a plus rien à faire, qu’il est inutile de lui courir après, qu’elle ne reviendra pas.
Elisa Palmer
PS / La question : « Et que faisais-tu en écrivant ce papier ? » restera sans réponse.