On le connaissait essentiellement pour sa musique nimbée de poésie rock. On savait qu’il s’adonnait avec la même passion à la peinture, la photographie et l’écriture. On découvrira qu’il est un poète de la ville, un chercheur de lumière dans le bitume des avenues new-yorkaises. Follow the line, c’est la route qu’il nous invite à prendre à travers les pages d’un très bel ouvrage consacré à quelques-unes de ses œuvres et qui paraîtra le 14 octobre prochain. Follow the line, comme une traversée de New York par les signes, les droites et les courbes, territoire urbain réinventé, labyrinthe qui défie notre cosmogonie de l’intime.
Se défaire de ce que l’on a acquis pour éventuellement sortir quelque chose de soi que l’on ne connaît pas… C’est cela être artiste pour CharlElie Couture. En quelque sorte, c’est se jeter dans le vide. Et ce, indépendamment du médium. Chez lui, pas d’opposition entre la musique et les arts plastiques. Au contraire, leur imbrication très étroite s’inscrit dans la continuité de son œuvre. Déjà, aux Beaux-Arts de Nancy, sous l’impulsion d’un enseignant – Michel Paré qui prônait la trans-disciplinarité, la création de CharlElie Couture couvrait plusieurs champs d’exploration. Je me suis toujours jeté dans l’art avec naïveté et enthousiasme, et avec le sentiment que je devais le faire, confie-t-il. Déjà savait-il écouter sourdre la source, et suivre ces signes qui surgissent de soi. J’ai fait les choses sans me dire à quoi ça sert et pourquoi je les fais. Autrement dit, ce qui compte, c’est l’impact d’une œuvre.
Si un livre n’est qu’une mise en bouche, s’il y a toujours un monde entre les reproductions et les œuvres, il n’empêche qu’il permet de mettre en lumière les vingt-cinq années de carrière d’un plasticien qui a emprunté les chemins de la photo, de la peinture, et du dessin, et travaillé sur une multitude de supports tels que des cartons d’emballage, des toiles cousues ou encore des rideaux de douche. C’est le premier livre qui montre une cohésion entre les différentes étapes de mon parcours. Un parcours d’artiste, animé d’une réflexion sur la mémoire où les recherches plastiques se rejoignent désormais autour du thème de la « re-construction » et l’ont conduit à adopter définitivement la ville comme territoire poétique.
New York. Pourquoi cette métropole ? C’est le centre du monde connu de moi, raconte CharlElie Couture, 192 nationalités, 140 communautés. Tu changes de rue, tu changes de continent. Cette organisation de la ville autour du travail où tu es jugé sur ce que tu fais m’interpelle. A New York, on a la sensation que beaucoup de choses sont possibles et je fais partie de ceux qui sont stimulés par le possible. New York comme territoire du possible, mais aussi comme enjeu de l’intime. En 2004, quand CharlElie Couture quitte Paris pour New York, c’est une façon pour lui de tourner la page, mais aussi de se risquer à un changement d’échelle et de perception des choses, comme l’écrit dans ses notes critiques à propos des œuvres de Follow the Line, Philippe Cyroulnik, critique d’art et commissaire d’exposition.
Tisser la trame de sa vie sur celle d’une ville, c’est en déchiffrer les signes. Les faire siens pour mieux les donner à lire aux autres. Les signes sont les premières peintures urbaines, explique l’artiste, elles définissent des codes de vie. Cela relève la question de la relation de l’individu avec son décor. Habité par des questions qui vont de la Kabbale à aujourd’hui, Charlélie Couture, fasciné par la signalétique urbaine et de ses dérivés, propose ainsi une chorégraphie de la ville.
New York and Follow the line. Suivre dans la nuit, photo après photo, ces lignes blanches rehaussées de lumière, parfois, cassées, brisées, parfois courbes, et courbées, parfois dans l’ombre des gratte-ciels, dans le vertige des impasses, dans les hiéroglyphes tagués, dans la démarche chaloupée d’une passante. S’inventer un chemin dans une ville qui devient nôtre et comprendre soudain qu’on n’est pas si loin du rêve américain. Et pourtant… Comme l’explique CharlElie Couture, à Paris, aller d’une rue à l’autre, c’est inclure une idée, une poésie, une histoire. A New York, d’une rue à l’autre, c’est un tracé efficace. On va d’idée efficace en idée efficace. Avec un pied dans chaque continent, on ne sait plus vraiment où l’on est, on retrouve les appréhensions et l’exaltation des premiers pas, et l’envie soudaine d’embrasser New York, comme on étreint un corps aimé.
A gauche ou à droite ? Au loin, une voix : » suivez l’itinéraire poétique. Il vous mènera jusqu’au 362 West 36th street, devant The Re Gallery. »
La porte est ouverte. L’artiste nous attend.
Par Odile Woesland
Dans toutes les bonnes librairies, le 14 octobre prochain. Follow the line aux éditions Verlhac.
1 comment
Very interesting and very good reflection whith the composition and ideas of the artist.. very contemporain and intenporel means of the target and choice of everything artists
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