Le 26 juin 2010 fut l’occasion d’assister à l’une des présentations les plus oniriques et poétiques de la mode masculine : celle de la collection Hommes Printemps Été 2011 du créateur japonais Mihara Yasuhiro. Son précédent défilé était accompagné de notes cristallines de violon mais cette fois-ci une attention particulière avait été apportée à la scénographie proprement dite avec un décor époustouflant en interaction avec le défilé suscitant une vive émotion dans l’assistance.
Inspiré par le livre de Henry David Thoreau Walden ou la vie dans les bois et par le film de Sean Penn Into the Wild, le créateur nous a proposé un show onirique combinant effets visuels et collection aboutie sur la relation entre l’homme et son environnement et plus précisément entre l’homme et la nature. Et lorsque l’homme se retrouve de nouveau envoûté par les lumières de la ville, il n’en oublie néanmoins pas ses nouvelles dispositions. Et pour accompagner le mâle urbain dans son périple vers son élément naturel, la société japonaise WOW a créé une mise en scène de toute beauté projetant des ombres chinoises en relation avec les silhouettes défilant sur la scène sur un mur écran de vidéo-projection.
La nature s’éveille doucement, une silhouette d’homme apparaît en ombres chinoises se transformant rapidement en milliers de silhouettes d’oiseaux prenant son envol. Le mâle urbain peut commencer son périple. Les tenues dans des tonalités beiges, marrons ou kakis se succèdent parfaitement adaptées pour une randonnées en forêt ou dans les hauteurs montagneuses et mettant en avant le bermuda. Les grosses chaussettes sont de rigueur qu’elles soient portées avec des mocassins, des sandales ou des chaussures de marche. L’accessoire idéal est le sac à dos. Mihara Yasuhiro réinvente le gilet de chasse et la saharienne. On retrouve quelques clins d’œil du créateur comme son fameux tartan, son goût pour l’asymétrie et sa tendance à multiplier les couches de vêtements.
Soudain, la pluie fait son apparition. D’abord timide, elle prend rapidement son essor. Le créateur propose alors des coupe-vents hybrides, mi-coupe-vent, mi-poncho pour protéger l’homme des intempéries. De nouveau, son goût pour l’asymétrie et les découpes explose. Le pantacourt est très présent et les vestes amples pullulent, laissent le corps libre dans ses mouvements.
L’homme s’enfonce de plus en plus dans la forêt, les longues vestes et manteaux se parent de motifs forestier, camouflage sous la forme de fleurs ou animalier comme cette tête d’aigle impressionnante. Puis, de nouveau, la silhouette d’homme réapparaît en ombres chinoises et se retrouve happée par un oiseau. Le cataclysme a lieu, tout s’envole, les feuilles, les arbres et les animaux.
Les lumières de la ville, probablement Paris, reprennent leur place. Le mâle urbain revient dans son environnement habituel et retrouve une tenue plus sophistiquée. Le costume s’allège pour une silhouette plus décontractée et épurée, le tissu est aérien. Pantacourts et bermudas alternent toujours portés avec des vestes. Seul parfois certains chaussures de marche portées en ville rappellent le périple de l’homme. Une seule constante : le sac à dos reste l’accessoire de prédilection de ce nouveau mâle.
Enfin, les lumières de la ville s’évaporent dans des milliers de bulles pour un final retour aux sources, à la nature. La silhouette de l’homme portée par un oiseau revient et se révèle être celle du créateur saluant sous un tonnerre d’applaudissements et sous un lâcher de plumes en ombres chinoises.
Mihara Yasuhiro a voulu ramener l’homme vers son environnement naturel et pour cela il nous délivre une véritable invitation au voyage. Invitation réussie tant elle nous a transportée dans cette nature si chère au créateur.
Marie-Odile Radom